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mardi 19 novembre 2019

HISTORADIO -- Une date, un homme : 19 novembre 1868 - Gustave-Auguste Ferrié

Gustave-Auguste Ferrié vint au monde  le 19 novembre 1868 à Saint-Michel-de-Maurienne (Savoie). Son père, Pierre Ferrié (1837-1911), originaire de Limoux (Aude) était un ingénieur des Ponts et Chaussées et travaillait sur la ligne de chemin de fer Fell devant relier Saint-Michel-de-Maurienne à Suse dans le Piémont en longeant la route du col du Mont Cenis. 

La compagnie anglaise Brassey-Fel, titulaire d’une concession d’une durée équivalente à celle des travaux du percement du tunnel du Mont Cenis, sous le Fréjus, exigeait de ses ingénieurs qu’ils habitent à une extrémité de la ligne. Cette exigence avait donc amené Pierre Ferrié à Saint-Michel-de-Maurienne où il épousa Joséphine Manecy, originaire d’une vieille famille de la ville. 

Le percement de ce tunnel long de treize kilomètres était un énorme projet pour l’époque. Le chantier devait durer quarante ans au minimum et certains n’hésitaient pas à le comparer sur le plan technique à celui du canal de Suez. Mais c’était sans compter sur l’inventivité des ingénieurs qui mirent en place des machines hydropneumatiques performantes accélérant la réalisation du chantier. Le premier train  franchit le tunnel le 16 octobre 1871, mettant ainsi fin la ligne Fell.

La famille Ferrié, qui comptait maintenant quatre enfants, s’installa à Draguignan, le père ayant été embauché par la compagnie des chemins de fer Sud-France en qualité d’ingénieur en chef du service « voies et bâtiments ». Après des études secondaires brillantes au lycée de Draguignan, Gustave-Auguste rejoignit Marseille où il prépara le concours d’entrée à l’Ecole polytechnique. Il y est admis en 1887 à l’âge de 19 ans.

A sa sortie, il fut nommé sous-lieutenant le 1er octobre 1889 et rejoignit l’Ecole d’application de l’artillerie et du Génie de Fontainebleau. Deux ans après, il sera affecté au régiment du génie à Grenoble et obtiendra ses galons de lieutenant. En suite il passera par la garnison de Besançon et sera promu capitaine le 6 avril 1897 à la chefferie du génie d'Albertville. En cette fin de XIXe siècle, les nouvelles techniques comme la télégraphie optique ou la télégraphie électrique peuvent être des voies d’avenir. Officier télégraphiste il sera affecté à l’Ecole de Télégraphie électrique du Mont Valérien et en deviendra le directeur. 

A cette époque, Guglielmo Marconi avait développé ses diverses inventions et était en mesure de proposer en Europe des équipements complets de télégraphie sans fil. Une commission interministérielle devait d’ailleurs, en mars 1899, procéder à une évaluation des matériels fabriqués par Marconi. Le colonel du Génie Jean Boulanger eut la charge de représenter  le ministère de la Guerre au sein de cette commission. Mal à l’aise avec cette technologie, il demanda au capitaine Ferrié de le remplacer jugeant ce dernier plus compétant en  la matière, d’autant plus qu’il venait de rejoindre l’Etablissement central du matériel de la Télégraphie Militaire.
Lors de sa démonstration, Marconi assura avec succès des liaisons radioélectriques en morse entre la plage de Wimereux (Pas-de-Calais) et South-Foreland en Angleterre sur une distance de 46 km. Des essais furent également réalisés entre des navires en mer et la côte, puis entre navires en mer. Les premiers donnèrent des résultats satisfaisants mais les contacts entre navires se révélèrent plus aléatoires. 

Le rapport du capitaine Ferrié sur ces essais fut très favorable et mit en avant les perspectives qu’offrait à l’armée cette nouvelle technologie. Le rapport remis au ministre de la Guerre fit l’objet de discussions entre les membres du Gouvernement. Celui-ci refusa de se lier à la société Marconi et le capitaine Ferrié fut chargé en 1900 par son ministre de développer la TSF militaire.

Le budget alloué au capitaine Ferrié est d’autant plus faible qu’il est imputé sur celui de la Télégraphie électrique militaire qui ne veut pas voir le sien baisser, et, que certains militaires considèrent la T.S.F. comme une technique sans lendemain. Les effectifs qui lui sont affectés sont du même niveau ; quelques militaires sans qualification mais aussi quelques officiers de valeur qui travaillent efficacement. Dans la caserne du 51 bis boulevard Latour-Maubourg, il installe son laboratoire et les premiers équipements sont mis au point. Une antenne sera accrochée au dôme des Invalides. L’Etablissement central de la télégraphie est créé.

Les équipements conçus et fabriqués sous l’impulsion du capitaine Ferrié deviennent peu à peu comparables à ceux existants à l’étranger. L’emploi de nouvelles limailles pour le tube de Branly, un nouveau détecteur électrolytique sont mis au point. Le « détecteur Ferrié, TM » est plus sensible que le cohéreur Branly pour détecter les ondes et séparer les parasites atmosphériques. 

En 1902, dans un guide pratique Eugène Ducretet indique : « avec des ballons captifs de 60 mètres cubes et des antennes pouvant atteindre 200 mètres de longueur, M. le capitaine du Génie Ferrié a pu établir sur terre, des liaisons entre postes de TSF distants de 150 kilomètres entre eux et placés sur des collines. »

Le 8 mai 1902 la Martinique se retrouve complètement isolée du reste du monde suite à l’éruption de la Montagne Pelée. Pour rétablir les communications, le gouvernement diligente une mission avec à sa tête le capitaine Ferrié. Le 4 décembre  1902, le premier télégramme est échangé grâce à la T.S.F. avec la Guadeloupe distante de 180 km. Le service sera assuré jusqu’à la fin de l’année 1903 par le lieutenant Mounier, le capitaine Ferrié ayant regagné la France en janvier 1903. Suite à cette catastrophe, le rôle de la T.S.F. sera abondamment commenté dans la presse et ses détracteurs seront bien obligés de revoir leur position.

La hauteur des antennes conditionnait la portée d’un émetteur, plus elles étaient hautes, plus les ondes voyageaient loin. C’est ainsi qu’apparurent des antennes « cerfs-volants » ou « ballons captifs » qui permettaient de déployer de grandes longueurs de fil, mais, celles-ci étaient peu pratiques par vents forts. Le capitaine Ferrié se mit en quête d’un point fixe dans Paris pour tendre l’antenne de la station de commandement du réseau radioélectrique de l’armée. 

La tour Eiffel était un support idéal. Construite à l’occasion de l’exposition universelle de 1889, elle fut la vitrine du savoir-faire français de l’époque. Imaginée par Maurice Koechlin et Emile Nouguier, respectivement responsables des études et des méthodes d’Eiffel & Cie, elle restait la propriété de Gustave Eiffel jusqu'en 1910. Ce dernier était, outre un ami du père du capitaine Ferrié – ils s’étaient rencontrés à plusieurs reprises sur des projets de ponts de chemins de fer – son « correspondant » dans la capitale lorsqu'il fréquenta l’Ecole de la Montagne Saint Geneviève (Polytechnique).

Gustave Eiffel ne se contenta pas seulement de donner son accord le 15 décembre 1903 mais apporta une assistance financière au capitaine de sorte que la direction du Génie n’engagea aucune nouvelle dépense. Le 21 janvier 1904, la Tour devient officiellement une station T.S.F. de l’Armée française. A 150 mètres du pilier sud, trois baraquements installés sur le Champ-de- Mars accueillent les équipements d’émission et de réception, l’antenne quant à elle est accrochée au premier étage, puis au second et enfin au sommet.

Avec une puissance inférieure à 10 kW et grâce à son antenne, la station de Paris réalise des liaisons à plus de 2.500 km, mais elle peut assurer des contacts permanents avec l’est de la  France, territoire particulièrement sensible.  La station sera ultérieurement installée sous terre non pas dans un souci de protection mais pour faire cesser une campagne de presse portant sur le manque d’esthétique des baraquements du Champs-de-Mars.

En janvier 1908, le capitaine Ferrié rejoint le Maroc pour participer à la campagne de pacification qui avait commencé quelques mois plus tôt. Ce sera l’occasion pour l’Armée française de mettre en œuvre pour la première fois un réseau de transmission sur un théâtre d’opérations extérieures. Une station fixe est basée à Casablanca et deux stations mobiles – le terme portable serait plus approprié – transportées à dos de mulet ou de cheval suivent les opérations sur le terrain. Elles permettent, grâce à leurs antennes de 28 mètres de haut, d’établir des liaisons d’une portée de 80 km.  La marine participe également à cette opération de pacification avec le croiseur Kléber qui correspond avec un navire en mouillage à Tanger. Les informations sont ensuite envoyées à Paris par le câble télégraphique Tanger-Oran-Marseille. La nuit, le Kléber écoule directement sont trafic avec la station de la Tour Eiffel. 

En juillet 1908, le capitaine Ferrié est de retour dans la capitale. Il assiste au commencement des travaux de construction de la station souterraine du Champs-de-Mars, le budget ayant été voté par le conseil de Paris le 3 avril 1908. Après quelques péripéties, dont la crue centennale de la Seine de 1910, la station devient opérationnelle. L’antenne est constituée de six câbles d’acier de 3 millimètres de diamètre et de 425 mètres de long sont accrochés à la plate-forme supérieure de la Tour Eiffel.

La station de la Tour Eiffel est une des plus puissantes et des plus modernes d’Europe. Elle assure des liaisons directes avec la Russie avec laquelle la France entretient alors d’excellentes relations. Le risque de voir l’Allemagne contrôler ou couper les câbles télégraphiques entre la France et Moscou, d’autant plus que les tensions avec nos voisins d’outre-Rhin se dégradent fortement. La flotte française est correctement dotée maintenant en équipement de T.S.F et il est envisagé d’équiper l’aviation. Le capitaine Ferrié a d’ailleurs procédé à des essais prometteurs depuis le dirigeable Clément Bayard.

S’il continue à développer la T.S.F. militaire, la capitaine Ferrié met au point une gamme d’appareils de mesures dont une nouvelle génération d’ondemètres. Il se passionne pour la géodésie et la météorologie d’autant plus qu’il voit les applications prometteuses que la T.S.F. pourrait apporter à ces sciences. Un grand pays comme la France a la nécessité de disposer de signaux de référence. A partir de 1909 en collaboration avec l’Observatoire de Paris, la station de la Tour Eiffel diffusera plusieurs familles de signaux scientifiques dont les signaux horaires. 

Dans la revue « La Science et la Vie » du mois de mai 1914 le commandant Ferrié déclare : «  On a songé, dès le début de la télégraphie sans fil, à envoyer régulièrement aux navires, à des instants fixés à l’avance, l’heure du méridien d’origine. Le Bureau des Longitudes a demandé et obtenu que la tour Eiffel envoie régulièrement et à toute puissance, à l’usage des navigateurs, des signaux horaires déterminés par l’Observatoire de Paris. Ce service fonctionne régulièrement depuis 1910 et les signaux sont perçus dans toutes les mers d’Europe, et souvent même la nuit, quand les circonstances atmosphériques sont  favorables, jusqu’au voisinage des côtes d’Amérique. Des stations radiotélégraphiques jouent le même rôle en d’autres points du globe ; mais la Conférence internationale de l’heure a choisi la tour Eiffel comme station centrale donnant  l’heure officielle. Une organisation spéciale utilisant aussi la télégraphie sans fil a été créée parallèlement, pour permettre à tous les observatoires importants de collaborer avec celui de Paris pour la connaissance de l’heure exacte et la transmettre par la tour Eiffel. La télégraphie sans fil a donc apporté ainsi une aide nouvelle à la sécurité de la navigation. Ces mêmes signaux horaires rendent encore de grands services aux administrations publiques, aux Compagnies de chemin de fer notamment, aux horlogers et aux particuliers. »

Grâce au commandant Ferrié, la France est en pointe dans ce domaine. Cela lui vaudra l’insigne honneur d’accueillir le siège du Bureau International de l’Heure à Paris, logé actuellement dans les locaux de l’Observatoire de Paris. définition classique du grand géodésien allemand Friedrich Robert Helmert (1843–1917), elle est « la science qui mesure et représente la surface terrestre ». L’apport de la T.S.F. dans cette discipline est un élément majeur dans le fait que la mesure du temps mis par l’onde pour se propager d’un point à un autre permet d’atteindre, pour l’époque, une précision remarquable. Dans l’article de la revue « La Science et la Vie » précité, le commandant Ferrié explique : 

« Des signaux horaires scientifiques, permettant d’obtenir une précision de l’ordre du centième de seconde, sont également transmis depuis 1909 par la tour Eiffel dans le but de permettre de déterminer des différences de longitudes avec une approximation plus grande que ne le permettent les observations astronomiques. On a ainsi pu déterminer, à quelques mètres près, la position astronomique, par rapport à celui de Paris, de plusieurs observatoires importants : Bruxelles, Alger, Toulouse, Nice, etc… Une opération de ce genre est en cours d’exécution entre Paris et Washington (6 200 kilomètres). D’autres sont en préparation. Le même procédé permet de faire rapidement le lever astronomique d’un canevas géodésique dans les régions où les méthodes ordinaires sont impraticables. C’est ainsi que l’on a opéré au Maroc, en Mauritanie, au Congo belge, en Amazonie, au Pérou… Les délimitations de frontières sont également facilitées par ce procédé… ».
La station du Champs-de-Mars joue également un rôle important dans la collecte d’informations météorologiques venant de la  province et assure une diffusion sur tout le territoire lors de bulletins réguliers à heures fixes Le commandant Ferrié veut développer l’usage de la T.S.F au service de la météorologie.

A la veille de la Grande Guerre, soit une quinzaine d’années après les débuts de la télégraphie sans fil française, les propos du commandant Ferrié d’alors était ceux d’un visionnaire : 

« Lorsque les défauts que comporte encore à l’heure actuelle la télégraphie sans fil auront pu être supprimés ou atténués, de nouvelles applications pourront être tentées et l’importance du nouveau moyen de communication deviendra encore plus considérable. Des études et recherches sont entreprises dans tous les pays dans ce but et nous pouvons espérer que les physiciens et les ingénieurs français joueront encore un grand rôle dans les découvertes que nous sommes en droit d’attendre…. »

André Blondel (1863-1938) a joué un rôle important dans le développement de la T.S.F. en France. En juin 1911 il avait installé sur les côtes françaises, les quatre premiers radiophares automatiques qui balisaient l’entrée des ports de Brest et du Havre. Il a également travaillé sur  l’’équipement de la station de la Tour Eiffel : décharge de condensateurs par un arc électrique, alternateur de hautes fréquences et récepteurs à « étincelles musicales » et autres installations.  Les Parisiens pouvaient admirer la nuit le halo bleu qui entourait les câbles de l’antenne dû à leur ionisation. Spectacle en temps de paix mais formidable repère pour être bombardé en temps de guerre. Ce constat fut établi le 2 août 1914, à la veille de la déclaration de la première Guerre Mondial. Il sera décidé de doubler la station du Champs-de-Mars en construisant celle de Lyon-La Doua.

Les forces allemandes disposent d’équipements performants de marque Telefunken. La Tour Eiffel intercepte les communications traduites par des radiotélégraphistes alsaciens. La force du signal reçu permet de suivre l’avancée de l’ennemi. « Mais ils sont à la porte Maillot ! » s’écrira Ferrié en cette fin Août 1914; dans les faits ils étaient à 25 kilomètres de la capitale.

L’Etat-major  et Ferrié décidèrent d’aménager, le 1er septembre 1914, en station T.S.F. la station du métro Trocadéro alors en construction. Les allemands bombardent certains quartiers de Paris et lancent des appels à la capitulation.  Le gouvernement est transféré à Bordeaux, tout le monde pense que la capitale va tomber dans les prochaines heures. 

La T.S.F. jouera un rôle important, souvent oublié, au cours de la grande guerre. L’écoute des communications allemandes permet de constater, dès le 2 septembre 1914, que les 1ère et 2eme armées allemandes se dirigent vers le sud-est. Ce renseignement est transmis à Joffre et à Gallieni. Le mouvement est confirmé par plusieurs reconnaissances aériennes. Les troupes allemandes sont fatiguées et l’intendance ne suit pas. Avant d’attaquer Paris, elles vont reprendre des forces en stationnant dans la région de la Marne. Le moment est idéal pour lancer une contre-attaque.  Ce sera la première bataille de la Marne avec le fameux épisode des Taxi de la Marne que Gallieni avaient réquisitionnés pour transporter sur le front deux mille soldats. La victoire  ne met pas fin à la guerre mais redonne le moral aux français. 

Autre fait important mais peu connu du rôle de la T.S.F. au cours de ce conflit, fut l’interception des messages entre Paris et Madrid dont l’analyse permettra l’arrestation de l’agent H21, la belle Mata-Hari. Les télégraphistes trouvent une nouvelle application à la T.S.F en se lançant dans la « guerre électronique » : brouillages des émissions, émissions de faux messages….

Un système d’écoute binauriculaire, permettant de localiser les lieux où l’ennemi creuse des galeries et les cavités dans lesquelles les munitions sont stockées, est mis au point par Ferrié. La T.S.F. installée à bord des avions de reconnaissance permet de collecter les informations nécessaires au réglage des tirs d’artillerie.

La station de Lyon-La Douai est construite en un temps record. Elle est opérationnelle le 16 septembre 1914 et a réalisé des liaisons avec Moscou. Ferrié a obtenu de son Etat-major, en reconnaissance du rôle tenu par la T.S.F. dans la bataille de la Marne, l’affectation d’ingénieurs et d’universitaires au sein de son laboratoire installé à Lyon.  Parmi eux, Henri Abraham (1868-1943) physicien, professeur à l’Ecole normale supérieure et à l’université de Paris, mettra au point la lampe TM, nouveau modèle de triode à filaments horizontaux, qui marque le début de l’électronique moderne. 

La Tour Eiffel transmettra, le 11 novembre 1918, au monde entier le radiotélégramme annonçant la signature de l’Armistice. Le colonel Ferrié est promu général la paix revenue. En 1919, le général Ferrié déclara :

« Mon service a fait beaucoup de choses pendant la guerre et n’a jamais rien publié à leur sujet. La guerre étant finie, la discrétion de mes collaborateurs n’aura plus de raisons d’être et le public pourra savoir que c’est la radiotélégraphie militaire française qui a créé toutes les nouveautés de la guerre dans cette branche : téléphonie par le sol, postes à ondes entretenues à lampes, récepteurs sur avions, téléphonie sans fil sur avion, radiogoniométrie, réception pour les sous-marins immergés, etc. » 
Revenu dans son laboratoire du 51 bis boulevard Latour-Maubourg, il continue à perfectionner le matériel militaire de T.S.F, tel l’amplificateur BF 3 Ter  équipé de trois lampes TM. Le général Ferrié était un visionnaire très en avance sur son époque. Il préconisait la formation des jeunes appelés, de les affecter en fonction de leur qualification. Il souhaitait créer des équipes associant l’armée et la société civile pour créer une puissante industrie radioélectrique française.

La lampe triode TM permettait la transmission de la parole. Des liaisons phonies  sont réalisées avec des petits émetteurs-récepteurs installés à bord des avions grâce à Camille Gutton, un fidèle de l’équipe Ferrié. Elle permettra également la transmission de la musique. La T.S.F, télégraphie sans fil évolue vers la T.S.F, la téléphonie sans fil. En 1921, la SFR-CSF, constructeur français de matériels radioélectriques, équipera le paquebot  « Paris » en téléphonie sans fil réalisera des contacts à plus de 300 miles de distance. 

SFR-CSF réalisera le 26 juin 1921 la retransmission sur les ondes d’un concert depuis son usine de Levallois-Perret. Le 26 novembre de la même année, elle diffusera sur les ondes de sa station de Saint-Assises, près de Melun, un tour de chant reçu à l’hôtel Lutétia de Paris.  Dans la revue « La Science et la Vie » publiera : 

« …que la voix était entendue de tous avec une grande intensité et une netteté parfaite. Ce concert fut entendu par de nombreuses stations radioélectriques françaises et étrangères dans un rayon de plus de 1600 kilomètres… « Le 9 décembre 1921, les souverains belges purent entendre nettement à Bruxelles, plusieurs artistes français chantant devant un tout petit microphone du poste d’émission de la tour Eiffel »

La Tour Eiffel n’était pas en reste. Depuis  le début du mois de novembre 1921 elle émettait un programme musical quotidien à 17 h 10, au cours duquel un bulletin météorologique et des informations tirées de la presse du soir. De nombreux auditeurs écoutaient ces émissions sur leurs postes à galène, la plupart du temps construits par eux-mêmes. Les émissions étaient parfaitement captées  dans un rayon de 1.500 kilomètres. 

En février 1922, Yvonne Printemps, les Guitry, père et fils, et de nombreuses personnalités dont le secrétaire d’Etat au PTT, participent à l’inauguration officielle des installations de téléphonie sans fil de la Tour Eiffel, invités par le général Ferrié.

Le général Ferrié développera une activité intense tout au log de sa vie. Le 6 février 1922 il est élu au premier tour à l’Académie des sciences en reconnaissance de ses qualités scientifiques exceptionnelles. Il participera activement aux séances de l’Institut et donnera de nombreuses communications. Il sera nommé Inspecteur des Transmissions poste qui reste la fonction suprême de l’Arme des Transmissions.

Il signera de nombreux articles dans les revues spécialisées, dont « L’Onde Electronique », attaché à vulgariser la technique de la radioélectricité. Il suit les travaux des radioamateurs dans le domaine des ondes courtes et n’hésite pas à leur rendre visite pour connaitre l’évolution de leurs recherches. Il participe à de nombreuses manifestations sur la radioélectricité, tant en France qu’à l’étranger. A la demande du président de la République, une loi spéciale sera votée à l’unanimité par les deux chambres pour maintenir en activité le général Ferrié bien qu’il ait atteint la limite d’âge. 

En 1925, l’exploitation de la station militaire de téléphonie de la Tour Eiffel est confiée à un journaliste parisien, Maurice Privat. Radio Tour Eiffel diffusera le premier journal parlé radiophonique. La radiodiffusion prend son envol et des stations s’implante dans plusieurs régions de France. En 1928, le caractère public de la radiodiffusion est affirmé dans une série de textes législatifs. Cependant il faut organiser le réseau de radiodiffusion publique. Au printemps 1930 le gouvernement charge le général Ferrié de cette mission. Le 31 juin 1931 les conclusions de la commission sont déposées. Le Plan Ferrié ou Carte Ferrié prévoit la construction d’une station de puissance en ondes longues au centre du pays pour diffuser  un programme national. Il prévoit aussi des stations régionales émettant en ondes moyennes et une station en ondes courtes pour couvrir les colonies.  Celui-ci inspire encore l’organisation actuelle de l’audiovisuel moderne. 

Après un séjour à Chambéry en février 1932, il est hospitalisé d’urgence au Val de Grâce pour de violents maux de ventre. L’équipe médicale diagnostique une péritonite liée à des crises d’appendicite que le général a négligé. Le 16 février, il décède. Ses funérailles rassemblent de nombreuses autorités en la Chapelle du Val de Grâce. Il repose au cimetière du Père Lachaise. 

La France venait de perdre un grand homme et un grand militaire. Il était alors le militaire français le plus décoré après Foch et avant Joffre.

Richard

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