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jeudi 11 janvier 2018

Une date, un homme : 11 janvier 1877 - Franck DUROQUIER

Franck Duroquier dans son laboratoire à Anché 
La Nouvelle République  25/02/2017
D'un père maître répétiteur au collège et d'une mère sans profession, Franck  Duroquier naît le 11 janvier 1877 à Lanterneau dans le Finistère.  Il effectuera sa scolarité à Thouars (Deux-Sèvres), ville où son père entra dans l'administration pénitentiaire en 1883 en qualité d'instituteur à la maison centrale.  Sans doute inspiré par ce dernier, il suivra le cursus de l'école normale  de Loches (Indre et Loire) de 1895 à 1898. Diplôme de la faculté des lettres de Poitiers (Vienne) il est nommé instituteur adjoint à Amboise (Indre et Loire). 

Le 10 août 1901, il épouse à Château-la Vallière (Indre et Loire)  Françoise Fayemendy, l'institutrice du village. S'en suivra en 1902 une affectation en qualité d'instituteur adjoint au Grand-Pressigny (Indre et Loire). Le couple deviendra quelques mois après instituteurs à La Haye-Descartes où leur fille Marie verra le jour.  (31 mai 1902-1992).

En 1903, les Duroquier sont mutés à Anché, village proche de Chinon, sur la rive gauche de la Vienne. Ils y resteront jusqu'en 1919. Madame s'occupe de la première école laïque de fille du village. Tout en assurant sa charge d'instituteur, Franck Duroquier exerce aussi, comme bien souvent dans la France  profonde de cette époque, les fonctions de secrétaire de mairie. Le coupe ne se contente pas d'enseigner aux enfants du village, il organise également des cours du soir pour les adultes. Au cours d'une de ces soirées, il est questionné sur la TSF.  Il va dès lors se passionner pour cette technologie alors naissante.

Dans un courrier daté de 7 juin 1919 adressé au Directeur de l'Instruction publique, il écrira :

Anché, l'école A droite et a gauche de l'image les mats
supportant l'antenne. Source AD.37.
" « je me suis adonné [...] depuis 1912 à l'étude des phénomènes de la résonance électrique et particulièrement de ceux qui trouvent une application en télégraphie sans fil ; de ceux qui peuvent fournir des renseignements précis sur l'état de la haute atmosphère et permettre la prévision du temps [...]. Ma méthode est en essai au Météorological Office de Londres. Les conclusions [de mes travaux] furent retenues par la commission interministérielle aux Etats-Unis [...]. M. Berget, professeur à l'Institut Océonographique, a consacré tout un chapitre de son ouvrage sur la Télégraphie sans fil aux expériences et aux constatations qui motivèrent mon cri d'alarme et dont la petite école d'Anché avait été le modeste laboratoire ».

Sans doute cette passion existait-elle déjà avant 1912. A cette époque, de très nombreux amateurs ont consacré leurs temps à cette technique naissante, et tout particulier un peu bricoleur pouvait construire son récepteur pour un coût modique. Ces "inventeurs" publiaient d'ailleurs des articles dans la très célèbre revue " La Nature" sur les aspects pratiques ou sur des innovations dans chaque livraison. 

La TSF n'est pas l'oeuvre d'un seul homme. De nombreux savants, ingénieurs, inventeurs et amateurs ont apporté leurs pierres à la construction de cet édifice appelé "Radio". Duroquier est l'un d'entre eux. Plusieurs amateurs ont proposé des dispositifs ingénieux à cette époque. Duroquier fut sans doute un des plus brillants.

Duroquier est cité par Claude Nowakowski et Alain Roux, dans leur ouvrage Histoire des systèmes de télécommunications (Lavoisier Tec & Doc, 1994), pp 138, 197, schéma p. 149. Il écrit de nombreux articles pour la revue La Nature (« La Télégraphie sans fil et la prévision du temps », 1913 ; « Le danger des ondes hertziennes », février 1914, etc.) et collabore avec Édouard Branly. 

Dans le volume de La Nature de 1912, on relève les noms d'autres radioamateurs comme G. Chalmarès, L. Fournier, A. Troller, etc. Il rédige notamment deux guides pratiques : La télégraphie sans fil pour tous (Orthac, Librairie générale de l'Enseignement, 1912, 71 pages) et le Guide pratique de la réception en télégraphie et téléphonie sans fil (Tours, 1914, impr. Arrault).

Source : AD37
Dans la préface de l'ouvrage de 1914, Duroquier présente le rôle de la TSF : 

« Un récepteur de TSF est devenu aussi commun qu'un appareil photographique ; il sera bientôt pour chaque famille un objet de première nécessité. Les mairies, les écoles, les châteaux, un grand nombre de particuliers reçoivent des signaux horaires, des télégrammes météorologiques et des nouvelles de la presse résumant les derniers événements de la journée, transmis quotidiennement par la puissante station du Champ de Mars. Lorsqu'on utilise nos détecteurs et nos téléphones spéciaux, un arbre, une éolienne, une lucarne, une cheminée, un clocher sont des supports commodes permettant l'installation rapide d'une antenne presque invisible et cependant de plusieurs milliers de kilomètres de portée. Un collecteur d'onde plus modeste, un fil téléphonique, une ligne d'éclairage, un simple grillage de 10 à 12 mètres tendus dans des conditions de bon isolement dans un grenier ou au-dessus d'une cour suffit même à la réception en France des signaux de la Tour Eiffel, d'Allemagne, d'Espagne, d'Angleterre et d'Algérie. L'extrême sensibilité des appareils Duroquier a permis la réception des signaux de la Tour Eiffel au lac Tchad et aux Etats-Unis et les a fait adopter par des particuliers dans les pays où la loi ne tolère pas l'érection d'antennes aériennes ».

Dans cet ouvrage, Duroquier présente les appareils qu'il a conçus, notamment le détecteur, qui est l'élément principal pour la réception, et vante les qualités de son produit :

« Ce qui assure la stabilité remarquable qui a fait le succès des détecteurs Duroquier, c'est la nature spéciale des cristaux qu'ils utilisent ; la surface de ces cristaux est extrêmement raboteuse, ce qui empêche la pointe de contact de glisser à la moindre trépidation ».

Source : BNf -Gallica
Les Duroquier commercialisent, par correspondance, des matériaux pour fabriquer des TSF. Leur fille, mise à contribution, gère le secrétariat. Franck Duroquier, en collaboration avec G. Pericaud, va fabriquer pour la vente un « récepteur horaire à galène » ; les deux hommes vont toutefois être en procès, Duroquier accusant Pericaud de lui avoir volé ses idées.

Des précisions sont également fournies par Duroquier quant aux matériaux employés:  « Vieux noyer vernis pour l'ébénisterie, enroulement en fil de cuivre isolé par deux couches de soie. Les curseurs sont extérieurement isolés, soigneusement calibrés et à lame de contact à goutte d'argent. »

Au cours de la première guerre mondiale, Franck Duroquier sera mobilisé dans les services de la TSF.  A la fin du conflit, il retrouve son poste d 'instituteur à Anché. L'évolution de la technique, avec l'apparition des lampes, l'amène à  s'orienter vers la vulgarisation de la TSF. Il se consacre à la rédaction d'ouvrages dont un des plus recherché, encore aujourd'hui pour les amateurs de postes à galène, est "La TSF. des amateurs : télégraphie, téléphonie : Manuel pour la construction et l'utilisation des appareils récepteurs de télégraphie sans fil". Dans un style  extrêmement clair et précis il y révèle de grandes qualités pédagogiques. Le lecteur n'a qu'à suivre pas à pas ses explications pour réussir son montage,  donne aussi toutes les explications pour fabriquer soi-même les cristaux de galène.et  fournit à la fin une bibliographie d'ouvrages de vulgarisation sur la TSF, agrémentés de ses commentaires pertinents. 
Source : AD37

La marque « Franck Duroquier » est par ailleurs déposée ; il écrit lui-même, dans la publicité pour ses appareils à la fin du volume La TSF pour les amateurs (1922), que ses modèles sont brevetés SGDG. Il semble que les appareils qu'il a conçu ait été fabriqués par d'autres, comme l'indique cette "réclame" de l'époque. 

Il suit avec précision les innovations technologiques puisqu'il présente la triode dans son livre Le meilleur récepteur radiophonique à 3 lampes, Le Scoladyne, construction (1928). 

De 1921 à 1924, Duroquier est nommé instituteur à Reugny. Il termine sa carrière à l'école de Saint-Symphorien, place de la Tranchée, de 1924 à 1928. Admis à la retraite en juillet 1928, il réside tout d'abord à Saint-Cyr-sur-Loire, puis à Tours,  jusqu'à son décès en 1972.

Pour ses travaux, Duroquier recevra la rosette de l'Instruction publique.


Publications de Franck Duroquier

- La télégraphie sans fil pour tous, Orthac, Librairie générale de l'Enseignement, 1912, 71 p. 
- Guide pratique de la réception en télégraphie et téléphonie sans fil Tours, 1914, impr. Arrault, 
- La TSF. des amateurs : télégraphie, téléphonie : Manuel pour la construction et l'utilisation des appareils récepteurs de télégraphie sans fil, 4e éd. revue et très augmentée, Paris, Masson et Cie, 1923, XI-303 p.
- Le meilleur récepteur téléphonique à trois lampes, le Scoladyne, Construction, Utilisation, Chez l’auteur, 1928, 52 p. 
- Les récepteurs téléphoniques modernes à la portée de tous, Paris, Masson, 1933, 191 p.


Sources : Archives départementales d'Indre-et-Loire  références : T1137
                BnF - Gallica 
                La Nouvelle République - Franck Duroquier, pionnier tourangeau de la TSF - 25/02/2017
                La Nature 


Richard

F4CZV
73

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